Bilan céréalier

«La pire saison en 35 ans de carrière!»

La saison céréalière 2024 restera dans les annales comme l’un des pires crus de ces dernières décennies. Un premier bilan fait non seulement état de rendements en chute libre (de -30 à -40%), mais la qualité n’était pas au rendez-vous et les prix restent faibles en raison de stocks mondiaux fournis et de perspectives de récoltes excellentes dans l’Hémisphère Sud. «Pour nos céréaliers, c’est la triple peine» confie Jean Wart, responsable céréales à la SCAM.

Ronald Pirlot

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«Les ennuis, c’est comme le papier hygiénique. On en tire une feuille et il en vient dix». Cette phrase de Woody Allen se veut un trait d’humour dans la grisaille des agriculteurs, même si, malheureusement, elle traduit actuellement leur triste réalité. Car non seulement l’élevage se trouve confrontée à la crise de la FCO-3, mais les céréaliers doivent pour leur part faire face à une situation historiquement difficile à l’issue d’une moisson céréalière qualifiée par d’aucuns de catastrophique. Les premiers chiffres sont de nature à engendrer une moisson de larmes…

De -30 à -40% de rendements en moins!

«La tendance générale est mauvaise à très mauvaise, aussi bien en escourgeon qu’en froment. On s’attendait que la saison ne soit pas extraordinaire, mais pas à ce point-là. C’est une année catastrophique. Les poids spécifiques sont très et en dessous des normes de commercialisation. Quant aux rendements, ils se situent entre 30 et 40% en dessous de la moyenne sur 5 ans» explique Jean Wart, responsable céréales au sein de la Société Coopérative agricole de la Meuse (SCAM).

Une situation qui résulte en grande partie des conditions météorologiques, et particulièrement des pluies incessantes enregistrées depuis un an. «Dans la plupart des cas, la floraison sous la pluie continue a occasionné une absence de fécondation au niveau de l’épi. Mal fécondé, celui-ci n’était pas rempli et, dans le peu de remplissage, les grains étaient légers» explique Jean Wart. A cela s’ajoute une perte d’efficacité des différentes applications fongicides pour le traitement des maladies foliaires et de l’épi, à cause des pluies incessantes.

Aucune région épargnée

Une situation d’autant plus catastrophique qu’elle se généralise à toutes les céréales et sur tout le territoire wallon. «Une partie du Hainaut présentant des terres plus filtrantes a sans doute enregistré des chiffres moins pires. Côté céréale, le triticale a peut-être un peu mieux résister dans certaines régions. Et encore…» ajoute Jean Wart.  

Faut-il dès lors craindre une quelconque pénurie sur le marché belge? «Non car la Belgique est importatrice net de céréales. Cependant, les froments de qualité panifiables (11 prot, 76kg) sont quasiment inexistants sur le marché intérieur».  

Quantité, qualité et… prix en berne

Une perte de rendement, une qualité moindre… et aucune perspective d’une compensation avec des prix plus élevés, vu les cours actuellement bas sur le marché céréalier mondial. «Le stock chez les 8 plus gros exportateurs restent important et le concurrence des blés russes à l’export reste très forte. Pour le moment, il ne faut pas s’attendre à un changement d’évolution de prix, d’autant plus que les récoltes de l’hémisphère Sud (Australie, Argentine) s’annoncent excellentes».

A la question de savoir s’il est envisageable d’imaginer un éventuel système compensatoire pour venir en aide aux céréaliers en difficulté, Jean Wart rétorque qu’il n’est pas à même de répondre. «Cependant, en tant que coopérative, la SCAM a récemment lancé une levée de fonds visant à recentrer ses actions autour des coopérateurs. Parmi les initiatives en leur faveur, une ristourne annuelle sur la «collecte» sera dorénavant octroyée aux coopérateurs Piliers et Acteurs». Une façon pour la coopérative d’apporter son soutien aux agriculteurs, tant dans les bonnes que, comme ici, dans les mauvaises années». Un plus initialement de nature à renforcer le statut du coopérateur au sein de la SCAM, qui s’avère bienvenu en ces temps particulièrement moroses.

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