Bio belge en grande distribution : il devenait urgent de renouer le dialogue!

Dossier Libramont 2024

Le dimanche 28 juillet était organisée à Libramont une conférence au nom évocateur: «La place du Bio belge en Grandes et Moyennes surfaces (GMS), état des lieux et perspectives». Cette conférence, suite logique des négociations entreprises depuis près d’un an, était organisée par la FWA, l’UNAB, le Collège des Producteurs et BioWallonie. Loin d’avoir pu révolutionner la situation actuelle, elle a toutefois permis de présenter des initiatives positives, de faire le point sur la situation actuelle, d’ouvrir le débat avec les représentants des grandes et moyennes surfaces ainsi que de se rendre compte des réalités de chaque maillon de cette chaîne de valeur ô combien fragile.

Benoit Thomassen
Directeur du service d’étude
Conseil, Analyse et Politique (FWA)

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Une conférence organisée par la FWA, l’UNAB, le Collège des Producteurs et BioWallonie

Tout commence à la Foire de Libramont 2023 avec la parution des chiffres du Baromètre des filières Bio de BioWallonie, notamment sur la viande de porc, où des marges excessives et des déréférencements sont observés. S’en suivent les premiers échanges sur le sujet entre COMEOS (la Fédération belge du Commerce et des Services) et les fédérations professionnelles. Très vite, les acteurs se rendent compte que le problème dépasse largement le cas de la filière porcine et s’étend à toutes les filières Bio. Décision est alors prise d’organiser une première réunion chez COMEOS, en novembre, entre les représentants des GMS, les syndicats de l’AgroFront (dont la FWA), l’UNAB, BioWallonie, Bio Forum Vlanderen et le Collège des Producteurs.

Des chiffres éloquents

Lors de cette première réunion, BioWallonie présenta les chiffres de 2022, ceux de 2023 n’étant pas encore complétement disponibles. Nous sommes alors en fin de période de forte inflation et de crise du pouvoir d’achat. Cependant, les chiffres présentés à cette réunion montrent que pour des produits similaires en bio et en conventionnel, le prix de vente sortie de ferme n’a pas augmenté, alors que certaines marges ont presque doublé pour les produits bio par rapport à ceux du conventionnel…

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Par conséquent, on constate logiquement une diminution des volumes vendus en bio et même un déréférencement des produits bio, accélérant la baisse des volumes vendus. Tout ceci dans un contexte agricole européen alors de plus en plus bouillonnant et avec des reconductions d’engagements bio qui se profilent.

Le lièvre levé, il faut l’apprivoiser…

Cette première réunion alarmiste n’aura cependant pas permis de récolter des réponses concrètes de la part des représentants de la distribution, mais l’on a par ailleurs senti un certain étonnement de leur part. Presqu’une surprise face aux représentants du secteur bio qui ne sont pas là pour quémander, mais bien pour demander de bâtir de nouvelles relations plus fortes et plus durables dans le temps, ainsi que respectueuses de tous les acteurs concernés. Il est alors décidé de se revoir et de réfléchir à comment y arriver. Heureusement, les chiffres de 2023 viendront rapidement alléger quelque peu ce constat, les marges ayant diminué sur les produits bio, mais restant cependant plus élevées qu’en conventionnel.

Après plusieurs réunions, une formation destinée aux acheteurs et acteurs de la distribution est donnée dans le cadre de la semaine bio par l’UNAB, une adresse e-mail de contact unique est créée au sein de BioWallonie et l’étude annuelle de COMEOS sur la part des produits d’origine belge dans la distribution en 2023 intègre les produits bio. 

Ayant fait le tour de la question lors de ces réunions tout en restant sur un goût de trop peu, la FWA a proposé à ces partenaires bio wallons d’organiser une conférence sur cette thématique lors de la Foire de Libramont pour exposer ces chiffres et en débattre avec les représentants des GMS, tout en présentant des exemples concrets de filières ayant pu se développer grâce à la grande distribution.

Une conférence pour informer mais aussi pour questionner

C’est donc sous l’angle de la présentation de la situation actuelle et sur les perspectives qu’était tournée la conférence de Libramont. Après une rapide présentation des études de BioWallonie et de COMEOS (citées plus haut), le Collège des Producteurs, via son Interface Producteurs Distributeurs, représentée par Camille Joubert, a pu présenter des solutions logistiques pour permettre aux producteurs bio de proposer leurs produits à la grande distribution, notamment via la création de codes-barres.

En termes d’expériences positives, BioMilk et Farm for Good ont pu expliquer les difficultés et les solutions trouvées depuis leur création et comment la grande distribution avait été un partenaire dans leur évolution.

Cette conférence aura aussi permis de mettre en exergue la confusion trop souvent faite entre produits locaux et produits bio. Les deux n’étant absolument pas incompatibles (bien du contraire), mais étant souvent utilisés de façon ambiguë, comme l’a bien malgré elle démontré COMEOS, en confondant les deux termes.

De son côté, l’UNAB, représentée par Thierry Van Hentenryk, a remis les choses en perspective en exposant des chiffres étrangers qui tendent à montrer une reprise des ventes en bio en GMS ainsi que les avantages à proposer une diversité forte de produits bio dans un magasin, plutôt que de déréférencer des produits.

Des conclusions encourageantes

En conclusion, l’ambitieux plan Bio 2030 a été amorcé à coup d’aides et de subventions, mais tous les acteurs concernés se rejoignent sur le fait que l’objectif ne sera pas atteint. Cependant, ce début de plan aura permis d’amorcer la pompe et de permettre à de nombreux agriculteurs de sauter le pas du bio. C’est maintenant par la transformation et la distribution des produits bio que doit s’opérer le reste de la mise en œuvre de ce plan, pour permettre un développement économique durable de ce mode de production, via une augmentation de la consommation. Point critique de cette stratégie: 2025 où près de la moitié des producteurs bio wallons (plus d’un millier d’entre eux) devront renouveler leur engagement. Il est donc vital qu’un tissu économique stable entoure leur production, au risque de n’atteindre aucun des objectifs du plan.

Point positif dans ces constats plutôt négatifs, le bio (et son image) fait vendre, les GMS en ont besoin, mais elles ont surtout besoin de filières organisées et de produits finis à mettre en rayon. Pour toute question ou initiative de leur part, BioWallonie a créé l’adresse générique suivante : gms@biowallonie.be.

Autre point positif, les ventes Bio en GMS repartent à la hausse et certaines filières commencent à bénéficier des avancées obtenues lors des discussions de cette année. Tout est donc encore possible avec de la bonne volonté et, surtout, tout est dans les mains des producteurs et des filières (existantes ou à créer). Le jeu n’en vaut-il pas la chandelle?

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