Europe : score de superstar

A l’heure d’écrire ces lignes, l’ensemble des résultats des pays de l’Union Européenne n’étaient pas encore disponibles. Cependant, de grandes tendances se dégagent déjà et laissent entrevoir au secteur l’espoir d’une meilleure conciliation d’agriculture et environnement pour la législature à venir…

Olivia Leruth

Cet article fait partie d’un dossier spécial sur les élections 2024. Retrouvez en les autres parties ici : https://journalpleinchamp.be/dossier-elections-2024/

Le premier élément révélateur de ce scrutin européen 2024 est sans conteste le score exceptionnel – même si un peu attendu – de Sophie Wilmes, ancienne première ministre et personnalité préférée des Belges francophones, tous sondages confondus. Pour sa première participation aux élections européennes, elle totalise 552.676 voix, un record en la matière, du côté francophone du moins. A titre de comparaison, le précédent record francophone était détenu par Elio di Rupo, qui avait totalisé 483.644 lors de son passage par le scrutin européen en 2004. Un exploit non-reconduit cette année pour le Montois, qui n’engrange «que» 152.402 voix, ce qui reste tout de même le deuxième meilleur score francophone.

Un membre FWA à l’Europe

Deuxième fait notable et qu’on n’attendait pas, ou plutôt que l’on n’osait pas espérer: la présence d’un représentant agricole pour notre staff belge francophone en la personne de Benoit Cassart. L’éleveur et fondateur de Fabroca aura fait le pari gagnant d’une troisième participation européenne, prouvant ainsi au monde agricole que oui, tout est possible, et notamment de parvenir à décrocher un troisième siège pour le MR, qui n’en avait jusqu’à présent que deux. Une fantastique victoire donc pour ce membre FWA qui pourra porter haut les couleurs agricoles jusqu’à Strasbourg au cours de cette nouvelle législature.

Vendredi dernier, à quelques heures du scrutin, Sophie Wilmès et Benoit Cassart visitaient la ferme d’Aline Depas, membre active de la FWA et candidate aux fédérales

Moins d’écologistes, plus d’environnement ?

Si la défaite semble assez claire en Belgique pour le parti Ecolo – certains parlent même de débâcle – il faut reconnaître qu’elle n’est pas spécifique à notre pays. A l’heure d’écrire ces lignes, la gifle semble cuisante également pour les Verts au niveau Européen, qui perdraient 18 sièges (et en conservent 53). Nos représentants belges francophones se voient ainsi amputés d’un siège vert, et Saskia Bricmont gardera son poste d’Eurodéputée.

Cela veut-il automatiquement dire qu’il y aura moins d’environnement au programme ? Rien n’est moins sûr. En effet, si les Verts perdent autant de terrain partout en Europe, c’est aussi parce que tous les partis aujourd’hui se sont emparés de leurs thématiques et qu’ils ont perdu le monopole, non pas du cœur, mais du vert. Ce qui peut définitivement être un plus pour le secteur agricole, qui pourrait voir des partis comme Renew (parti des libéraux, souvent favorable aux dossiers environnementaux) se voir renforcé sur ces questions tout en accueillant en son sein des personnalités plus proches du terrain. De là à y voir une meilleure prise en compte de la question agricole dans les objectifs environnementaux, débouchant ainsi (enfin) sur un mariage harmonieux ? En tout cas, les premiers résultats laissent place à l’espoir.

Changement de cap en vue pour les Engagés ?

Et en parlant de Renew, l’une des inconnues qui subsiste encore, bien qu’il s’agisse d’un secret de Polichinelle, c’est l’allégeance des Engagés au PPE (Parti Populaire Européen). A plusieurs reprises, Maxime Prévot a laissé entendre durant la campagne qu’il n’excluait pas de quitter le PPE, aux idées bien plus à droites et conservatrices que celles du parti belge, se revendiquant strictement du centre. On se souvient encore notamment du passage de Maxime Prévot à la FWA il y a de cela quelques mois, entouré de René Colin et François Desquenes pour aborder les questions agricoles, et son positionnement sur les pesticides très éloigné de celui de son grand frère européen. Si la position zéro pesticide des centristes semble avoir évolué depuis lors vers une mise en priorité de la recherche et de la concrétisation de solutions viables pour tous les agriculteurs avant une quelconque interdiction, il se pourrait bien que le parti choisisse de rejoindre le MR au sein du parti Renew, plus aligné à leurs positions. Une aubaine pour un groupe politique qui semble lui aussi perdre pas mal de plumes dans les résultats actuellement disponibles au niveau européen. Gageons que la bonne ambiance entre les deux partis vainqueurs des élections belges pourra aider à cette intégration.

Les gros dossiers à venir au niveau européen

Et ce dossier des pesticides sera évidemment au menu des prochaines discussions. Car si la Présidente von der Leyen a annoncé en grande pompe lors des manifestations agricoles que la Commission retirait son texte SUR (diminution des pesticides), c’était évidemment pour pouvoir en proposer une version «concertée avec les agriculteurs» et a priori plus réaliste.

L’autre enjeu majeur sera évidemment celui de la nouvelle PAC, puisque les discussions devraient commencer mi-2025 pour permettre à la PAC 2028-2031 d’être opérationnelle dans les temps et d’éviter le fiasco de la version 2023-2027. Les conclusions du dialogue stratégique sur l’avenir de l’agriculture, qui pourraient servir de base à ce travail, sont attendues pour le mois de septembre de cette année.

Dernier dossier à donner des maux de tête et de ventre aux plus stoïques d’entre nous : les accords de libre-échange… Si la victoire du PPE, plutôt favorable à la logique de marché et au Mercosur notamment, se confirme, on peut imaginer qu’il sera difficile d’y échapper dans les années à venir… Eclaircie cependant : avant les élections, les partis semblaient tous unanimes sur la nécessité d’appliquer à l’avenir des clauses-miroirs solides, c’est-à-dire qui fixeraient aux produits importés chez nous les mêmes règles que les nôtres. Mission impossible ? L’avenir nous le dira…

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