Isoler les bovins nouvellement achetés
Une précaution élémentaire
Au sommaire de sa dernière communication aux producteurs qui accompagne les résultats mensuels, le Comité du Lait rappelait l’obligation d’isoler les bovins nouvellement achetés avant leur introduction dans le troupeau. Il s’agit là d’une précaution élémentaire. Vouloir faire fi de cette obligation ne peut en aucun cas être une option.
André Ledur
Conseiller lait
Conseil, Analyse et Politique (CAP)
© FM/Pleinchamp
La santé et le bien-être animal sont des points importants dans la filière laitière et cet élément est contrôlé au niveau du cahier des charges QFL. La lutte contre les maladies représente collectivement un coût important, en témoignent les cotisations des éleveurs au Fonds de santé qui permettent de mutualiser les risques. Au-delà de ces cotisations, toute maladie, lorsqu’elle frappe un élevage, a un impact économique direct et parfois considérable (IBR, BVD, Paratuberculose…). Les mesures de biosécurité sont indispensables afin de réduire les risques.
Que dit la législation?
Le nouvel Arrêté royal du 18/04/24 précise ce qu’est l’isolement: «la détention des animaux dans une partie de l’établissement complètement séparée des autres parties de l’établissement de manière à ce qu’ils n’aient aucun contact direct avec les autres animaux de l’établissement, ni avec les animaux d’établissements voisins».
A l’Article 32 – § 1er. «Tout opérateur qui introduit un (lot de) bovin(s) dans son établissement, en vue d’ajouter ce(s) bovin(s) dans un troupeau conventionnel ou à partir du 1er novembre 2024 dans un troupeau d’engraissement, doit le(s) maintenir isolé(s). De plus, il doit faire appel au vétérinaire d’exploitation, dans les 2 jours ouvrables suivant son/leur arrivée, pour faire effectuer les tests décrits à l’annexe 7».
Difficultés pratiques
Si la majorité des exploitations achètent généralement peu de vaches laitières, il ne faut pas minimiser l’impact de cette règle. En effet, avec l’augmentation de la taille des troupeaux laitiers et dans certains cas, la délocalisation ou l’abandon de l’élevage, les introductions de bovins, plus particulièrement de vaches laitières, peuvent être plus régulières et plus importantes. Il en est de même pour les exploitations confrontées à un plan d’épuration (IBR…). Ajoutons enfin que la législation n’est absolument pas prévue pour les troupeaux avec robot puisque dans ce cas, l’isolement implique de facto de garder une option de traite manuelle pour les introductions ! Disposer d’infrastructures d’isolement en suffisance représente un certain coût, sans oublier l’impact sur l’organisation et le temps de travail.
Privilégier l’achat de jeune bétail
Les opérations de traite, pour lesquelles on recommande de traire les vaches nouvellement achetées après celles du troupeau en portant une attention particulière au nettoyage de l’installation, posent clairement problèmes en termes d’organisation. Une difficulté encore bien plus grande dans les exploitations avec traite robotisée. Dans la mesure du possible, il convient donc d’éviter d’acheter des vaches en production. Par ailleurs, en tenant compte du risque au vêlage, mais plus encore de celui lié à la transmission de maladies in utero comme le BVD, qui peuvent être de véritables bombes à retardement, l’achat de femelles pleines est également fortement déconseillé.
D’un point de vue épidémiologique, il est préférable de privilégier l’achat de jeune bétail qui aura cette faculté de s’acclimater plus facilement à l’ambiance de l’exploitation et pour lequel l’isolement est plus simple à organiser. De même, un isolement en prairie sans possibilité de contact avec d’autres bovins peut assez facilement être mis en place pour les achats réalisés durant la saison de pâturage. L’isolement en prairie est également autorisé en hiver moyennant l’existence d’un abri végétal ou en dur avec apport de nourriture et d’eau.
Durée d’isolement
La durée d’isolement est déterminée par le temps nécessaire à réaliser les tests décrits à l’annexe 7 de l’AR IBR du 18/04/2024, à savoir une première prise de sang dans les 5 jours suivie d’un second examen sérologique entre le 28ème et le 50ème jour après l’achat. Les bovins ne pourront sortir de l’isolement et entrer dans le troupeau que si l’ensemble des bovins du lot sont confirmés indemnes de BoHV-1. Un délai de 3 à 5 jours ouvrables est nécessaire pour le résultat d’analyse en période creuse. Ce délai peut être allongé lorsque les laboratoires travaillent à flux tendu comme en période hivernale.
Comment dès lors concilier les difficultés pratiques rencontrées en ferme avec un impératif de sécurité en termes de santé animale ? Une solution serait de réduire la durée de la quarantaine en réalisant la première prise de sang chez le vendeur. Cela ne pourrait être envisagé que sous des conditions extrêmement strictes. Il faudrait d’une part avoir la garantie que le vendeur n’a pas lui-même introduit de nouveaux bovins dans son propre troupeau au cours des 30 jours précédant la vente et, d’autre part, s’assurer que le transport soit totalement « biosécurisé ». Le transport est malheureusement une porte d’entrée trop fréquente pour bon nombre de maladies, même en cas de transfert unique d’un élevage A vers un élevage B. C’est particulièrement vrai pour les importations sur de plus longues distances, avec des temps de repos. Le problème est donc complexe. Quoi qu’il en soit, pour les maladies à déclaration obligatoire, les deux prises de sang à l’achat restent obligatoires au niveau de l’acheteur.
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