Lever les idées reçues sur les buses anti-dérive

À chaque saison de pulvérisation, se pose la question de l’efficacité des buses anti-dérive. Utilisées depuis une petite dizaine d’années et obligatoires depuis 2019 en Wallonie, elles ont pourtant fait leurs preuves pour atteindre le difficile compromis entre réduction de la dérive et efficacité du traitement. Seuls points d’attention: les produits de contact utilisés sur de très jeunes adventices et une trop grande réduction du volume-hectare.

PROTECT’eau

Réduire la dérive sans perdre en efficacité

«Comme elles produisent des grosses gouttes, les buses anti-dérive ne sont pas aussi efficaces.» Voilà la réflexion que les conseillers PROTECT’eau entendent parfois dans les campagnes, au détour d’une visite en ferme ou d’une formation phytolicence. S’il est vrai que de plus grosses gouttes sont recherchées afin de limiter la dérive, leur taille n’est pas forcément limitante pour la réussite du traitement. Les buses anti-dérive produisent des gouttes dont la taille varie de «moyennes» à «ultra grosses», selon leur type, leur calibre et la pression à laquelle elles sont utilisées.

Une classification internationale associe un symbole et une couleur à la taille des gouttes (ASABE). On retrouve cette information sur les tableaux de débit des constructeurs de buses

Pour un même volume de bouillie, plus les gouttes produites sont fines, plus les impacts sur la cible sont nombreux et meilleure est la couverture de la cible.

Tous les produits ne nécessitent toutefois pas le même niveau de couverture. La taille des gouttes, et donc la densité des impacts sur la cible, n’a pas d’effet sur l’efficacité d’un produit systémique racinaire. L’efficacité de ces produits dépend en effet moins de la qualité de pulvérisation que de l’humidité du sol. On pourra donc, sans crainte, utiliser des buses produisant les gouttes les plus grosses pour ce type de traitement. En revanche, les produits de contact sont les plus exigeants en matière de qualité de pulvérisation car ils sont très peu mobiles dans la plante. Si les adventices sont jeunes et donc plus difficiles à atteindre, il faudra privilégier des gouttes de taille moyenne pour maximiser la densité des impacts. Enfin, les produits systémiques foliaires, qui requièrent de pénétrer dans la plante par les feuilles pour agir, sont moins tributaires de la taille des gouttes. On pourra donc réaliser une pulvérisation avec des gouttes moyennes à grosses toutes en veillant à ce que les conditions soient «poussantes» pour optimiser l’efficacité de ce type de traitement. 

Source schémas de buses : Teejet

Diversité des buses

Plusieurs facteurs sont à prendre en compte dans le choix d‘une buse anti-dérive : la technologie de la buse, le calibre et la plage de pression. Ainsi, les buses à fente classique sont aujourd’hui délaissées car seuls les gros calibres de quelques marques sont reconnus anti-dérive à 50 %.

Les buses à pastille de calibrage se distinguent par une pastille qui calibre la bouillie à l’entrée de la buse, augmentant la taille des gouttes. Ces buses produisent en général des gouttes moyennes à grosses. En matière de qualité de recouvrement, elles sont une bonne alternative à la buse à fente classique, par exemple, pour la réalisation des traitements de contact.

Les buses à aspiration d’air reposent sur « l’effet Venturi » : l’air aspiré se mélange à la bouillie et crée une dépression augmentant la taille des gouttes. Les modèles actuels de buses à aspiration d’air dites « basse pression » s’utilisent entre 1,5 et 6 bars et produisent des gouttes moyennes à très grosses. Les buses à aspiration d’air « classiques » (modèles plus anciens) s’utilisent entre 3 et 8 bars et produisent des gouttes grosses à extrêmement grosses. Une nouvelle génération de buses à aspiration d’air arrive sur le marché et permet d’obtenir des gouttes ultra grosses.

Enfin, dans les buses à miroir, la bouillie est projetée contre une paroi à la sortie de la buse. Elles produisent des gouttes moyennes à grosses pour la version classique et extrêmement grosses pour la version avec aspiration d’air.

Produits de contact : prudence sur les jeunes adventices

En betterave, le désherbage des jeunes adventices avec des buses anti-dérive peut rebuter de nombreux agriculteurs. On cherche, en effet, à atteindre des cibles étroites, à faibles doses, notamment avec des produits de contact qui nécessitent une pulvérisation la plus couvrante possible.

En année normale, des essais réalisés en 2018 et 2019 par l’IRBAB ont montré très peu de différences d’efficacité entre les types de buses testées, qu’elles soient anti-dérive ou non. Pour certaines buses à aspiration d’air classique, il est cependant nécessaire de bien respecter la pression d’utilisation qui est plus élevée que pour les autres types de buses.

Par contre, l’essai mené par l’IRBAB et le CRA-W en 2017, en conditions sèches, a montré des résultats plus contrastés entre les différents types de buses. En raison du manque d’eau dans les sols, l’efficacité des produits racinaires était limitée. Ce sont les produits de contact (« Betanal » et « Tramat ») qui ont assuré une grande partie de l’efficacité du traitement FAR. Une très bonne efficacité a été observée pour les buses à miroir et à pastille de calibrage. Les gouttes de taille « moyennes » étaient donc suffisantes pour assurer un bon recouvrement de la cible. En revanche, les buses à aspiration d’air classiques et, surtout les buses miroir à aspiration d’air qui produisent des gouttes « grosses à extrêmement grosses », n’ont pas atteint le seuil d’efficacité du traitement (95 %). Les buses à aspiration d’air basse pression n’ont pas été testées.

Attention au volume hectare avec les produits de contact

Pour un traitement de contact, l’influence du volume/ha sur l’efficacité est clairement établie. En règle générale, plus on diminue le volume hectare, plus le taux de recouvrement de la cible diminue. Comme la couverture de la cible diminue encore avec des buses à aspiration d’air (vu qu’elles produisent des grosses gouttes), les traitements de contact avec ce type de buses ne sera plus efficace en dessous de 150 l/ha sur de jeunes adventices.

Les buses à pastille de calibrage et à miroir gardent une bonne efficacité à 100 l/ha. Cependant, le choix des buses anti-dérive permettant ces volumes est restreint, les plus petits calibres étant limités à 50 % seulement de réduction de la dérive.

Les buses à miroir avec aspiration d’air sont à éviter pour les produits de contact car leur efficacité est insuffisante, peu importe le volume hectare.

Le conseil de PROTECT’eau

Afin de garantir l’efficacité de vos traitements, PROTECT’eau propose d’équiper votre porte-buse avec au minimum deux types de buses :

  • Une buse à pastille de calibrage pour effectuer tous les traitements, y compris avec des produits de contact. Comme ces buses sont reconnues à seulement 50 % d’anti-dérive, il faudra privilégier les produits ne nécessitant pas 75 ou 90 % d’anti-dérive (voir étiquette).
  • Une buse à aspiration d’air classique pour atteindre les 90 % d’anti-dérive, à réserver de préférence aux traitements systémiques et racinaires.

Toute l’information agricole directement dans votre boîte aux lettres ?

Abonnez-vous au journal Pleinchamp